Vibrer........comme les branches d'un diapason
Vibrer........comme une flûte de roseau au moindre souffle de vie
Vibrer........comme les arbres sous la musique du vent
Vibrer........comme l'eau se ride sous la caresse de l'air
Vibrer........au rythme de la nature
Vibrer .......comme un coeur touché par la grâce de la musique

-......-......-......-......-.......-

Ecouter, regarder, sentir, toucher, savourer ce que m'offre la nature
Ouvrir mon coeur et me laisser envahir par les émotions
Ouvrir mon coeur et ma porte et laisser entrer tous mes petits amis à poils et à plumes
Leur offrir le meilleur de moi-même avec mon coeur d'enfant qui n'a jamais cessé de s'émerveiller
Proposer un instant de paix dans ce monde devenu inhumain

-......-......-......-......-.....-


BIENVENUE AU REFUGE DE JENNY

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samedi 26 janvier 2013

Au Bois de Vincennes






Les dimanches où papa était de congé - et où il faisait beau -, nous allions de temps en temps du côté de Saint-Mandé. J'aimais bien le bois de Vincennes.

Je marchais le nez en l'air, guettant les écureuils, et essayant de découvrir quels oiseaux nous accompagnaient lors de nos promenades. Curieusement, c'était au ras du sol que j'apercevais mes petits animaux préférés....., petites flèches rousses traversant le chemin pour disparaître dans le buisson en face. Quelle joie lorsque je surprenais l'un d'eux, tranquillement assis au pied d'un arbre, ou bien fouinant dans la terre, sans doute à la recherche d'une noisette cachée par ce grand étourdi







Les oiseaux étaient plus difficiles à observer, sauf les moineaux, les pigeons, et les cygnes qui se prélassaient sur le lac.






 Mais ce que je préférais surtout, c'était le petit cours d'eau qui passait à Saint-Mandé et où je savais que j'allais voir plein d'insectes aquatiques, des "mouches" marchant sur l'eau, mais surtout des libellules de toutes les couleurs..












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J'aimais attraper les têtards avec une épuisette. Au fil des jours, cela devint une véritable passion. Et c'est ainsi que le logement de Paris vit de nouveaux animaux arriver - transportés dans l'inévitable pot à lait -, puis installés dans une immense bassine, dans l'eau d'origine que j'avais soin de mélanger à l'eau du robinet, afin de ne pas modifier les habitudes de mes nouveaux compagnons.


Au fur et à mesure de transformation, je rajoutais des branchages, des pierres, j'essayais maladroitement de recréer un milieu naturel....
J'avais même installé des échelles pour savoir quel temps il allait faire ! Mais je crois que si elles aimaient se percher sur celles-ci, elles se moquaient bien de la météo !

Un soir, en revenant d'une après-midi vadrouille, quelle surprise : les minuscules grenouilles qui n'avaient pas encore totalement perdu leur queue s'étaient égaillées dans toute la pièce : elles avaient sauté par-dessus le rebord de la bassine, et il y en avait sur la table, sur les chaises, sur le sol......
Il me fallut un bon bout de temps pour les récupérer toutes, les "enfermer" dans plusieurs bassines aménagées par les soins de papa, afin qu'elles puissent attendre le lendemain pour retrouver leur liberté. Cela me fit tout drôle de les relâcher en pleine nature, et de les voir se précipiter vers leur lieu de naissance....

Qu'elles étaient jolies mes petites grenouilles qui sautaient d'une pierre à l'autre, qui nageaient de façon si harmonieuse, qui semblaient si heureuses de profiter de l'eau, des feuilles, et du soleil.....








mardi 22 janvier 2013

Naissance..








En deux années, j'avais fait des découvertes fantastiques. Je savais désormais pourquoi le coq s'agrippait sur le cou des poules - les rendant ainsi fort laides ! -;  j'avais vu deux chiens marchant "collés" l'un à l'autre, -  l'un des deux,le plus petit, traîné par le plus grand dans le sens inverse -; je reconnaissais l' appel des minettes et les cris rauques qui le suivait, ainsi que les bagarres entres matous; j'avais vu ce qu'était un âne à 5 pattes, -impressionnant ! -( je m'étais bien gardée de raconter à ma mère que les copains que je m'étais fait à Chilly m'entraînaient parfois dans de drôles d'histoires)...; je contemplais perplexe l'accouplement des escargots ;  je ne comprenais pas très bien comment les gendarmes pouvaient s'accoupler sur une file interminable ; j'avais vainement cherché dans le dictionnaire une photo d'une "menthe religieuse" dévorant son "fiancé" après avoir obtenu de lui ce qu'elle souhaitait....












J'avais eu très peur lorsqu'un lapin avait chevauché une lapine et avait poussé un cri strident avant de tomber inanimé sur le flanc....J'étais persuadée qu'il en était mort ( et ce cri !!! alors que les lapins sont silencieux !!)

J'aurais bien aimé que la chienne Boulie ait enfin des petits....Mais si je la voyais grossir, je ne savais pas encore ce que devenaient les bébés .....
Ceci était mon espoir secret : la voir allaiter ses bébés, puis voir grandir les chiots, comme je l'avais vu dans d'autres fermes...


Mais cela me serait toujours refusé :
Je le compris lorsque je découvris un soir, en revenant de l'école, ma Mickeyte emmaillotée dans des bandages qui lui comprimaient le ventre, et que ma mère m'expliqua qu'elle avait subi une opération pour qu'elle ne "tombe" pas enceinte....
- " Pourquoi, maman ? "
Et ma mère m'avait alors expliqué comment Madame Alazard noyait les chatons et les chiots de Boulie.....
Je fus stupéfaite par tant de cruauté insoupçonnée, mais hélas, je me sentais bien impuissante devant la méchanceté des grandes personnes....

Les animaux s'étaient donc  chargés d'une grande partie de mon apprentissage....
Mais l'été de mes 10 ans, j'allais avoir une grande émotion....

Dans toutes mes activités, je n'étais pas suivie que par Boulie. Il y avait aussi une chatte blanche avec quelques taches qui m'avait offert son amitié dès mon premier séjour à Chilly. Bizarrement, Mickeyte acceptait cette minette et partageait le plus naturellement ses puces - que d'histoires pour des puces !!!
Mais il est vrai que si Mickeyte était peignée chaque jour avec soin et que le moindre petit point noir était éliminé entre les ongles avec un curieux craquement, il n'en était évidemment pas de même pour les autres chats vivant dans la ferme.
La minette nous rendait donc visite régulièrement dans la pièce que nous occupions à l'étage. Et elle et Mickeyte se partageaient mes genoux lorsque je lisais aux heures chaudes de la journée..

Depuis quelques jours, la minette me recherchait de plus en plus. Elle ne voulait plus quitter mes genoux et me demandait par des miaulements impérieux de la suivre dans l'une des granges. Je ne comprenais pas cette insistance : j'avais vu qu'elle attendait des bébés, certes, mais pourquoi voulait-elle ma présence continuellement ?



Un soir -il ne faisait pas encore nuit-, elle insista davantage..je la suivis, elle avait déjà préparé un endroit à l'abri des regards qu'elle se mit en devoir de rendre plus confortable. Je la sentais nerveuse, alors, je me mis à parler doucement, à lui raconter n'importe quoi, à chantonner -presque un murmure-, et la minette s'installa dans sa couche de paille. A ce moment-là, ma mère m'appela. Je quittai donc la minette à contre-coeur....Mais au moment où j'allai entrer dans notre cuisine, la minette était derrière moi, et miaulait, miaulait...
Je repartis donc dans la grange - et tant pis pour les paroles peu aimables qui m'accompagnèrent.
Mais rien ne se passait.
Ma mère revint me chercher, furieuse... Je la suivis, mais la minette aussi vint avec nous et s'agrippant à mes jambes nues, miaula son désespoir.
Cette fois, je compris que ma place était auprès d'elle...Peu importaient les récriminations de ma mère, peu importait le fait que l'heure du dîner soit passée, puis l'heure du coucher....
J'étais assise à côté de la minette qui ronronnait dès que je lui parlais. J'arrêtais de chantonner, elle ne miaulait plus. Je recommençai à parler/chantonner, elle ronronnait de nouveau.

Et - combien de temps s'était écoulé ? qu'importe ! - minette mit au monde le premier bébé. Puis un second...

C'est le moment que choisit ma mère pour venir me chercher, furibonde.....

Une fois de plus, je refusai de venir, et à ce moment-là, dès que maman fut partie, minette prit dans sa gueule l'un des deux bébés encore tout gluant et me le mit sur mes genoux....

J'en avais les larmes aux yeux....Trop d'émotion pour la petite fille que j'étais encore.....

Les deux autres bébés naquirent à leur tour : je les pris de moi-même dans mes mains et les massai avec de la paille la plus douce possible.

Quand les bébés commencèrent à téter leur maman, je regagnai enfin mon lit....



Ce fut le premier accouchement auquel j'assistais.....Ce ne serait pas le dernier. Madame Alazard ne tua pas les bébés cette fois-là, et j'eus l'immense bonheur de les voir grandir les trois semaines qui suivirent.....avant de retourner dans ce Paris que je détestais de plus en plus.




Quand nous revînmes aux petites vacances suivantes, les bébés étaient de vrais petits diables....







samedi 19 janvier 2013

Un coq à Paris.....





Des poissons - désormais protégés par l'installation d'une sorte de grand coffre grillagé ( Mickeyte aurait bien aimé jouer avec eux.....) -, des perruches, Kiki le cochon d'Inde, et Mickeyte, bien sûr....
Le logement de Paris déjà minuscule semblait de plus en plus petit, d'autant plus qu'il fallait  de la place pour ranger les graines, les copeaux, et tous les accessoires indispensables à mes petits compagnons, et, en plus, caser les livres que je rapportais de la bibliothèque,  et aussi les nouveaux disques, et surtout tous mes cahiers d'école qui étaient soigneusement rangés et qui, à eux seuls, prenaient une très grande place...
Et pourtant......



Un soir de courses Rue Mouffetard, des pépiements insistants m'attirèrent..... Des poussins !!
Des dizaines et des dizaines de poussins !!!
Il y en avait même qui avaient été teints en bleu , en vert, en rose ! L'horreur !
Mais les minuscules poussins jaunes qui pépiaient, blottis les uns contre les autres pour se tenir chaud - c'était encore une soirée de fin d'hiver - me faisaient frissonner .....

Evidemment, je n'étais pas la seule enfant à les admirer avec envie.....Pas les colorés, oh non !!! j'avais eu la grande joie de voir éclore des oeufs à Chilly, et ces poussins bleus ou roses me rendaient profondément triste. Mais comment résister au désir de tenir entre mes mains un aussi petit bébé ? De tous les badauds qui s'agglutinaient autour des poussins, j'étais certainement la plus intéressée, et je n'hésitais pas à me faufiler entre tout le monde pour rester à la meilleure place, malgré la bousculade.

- " Maman, tu achètes un poussin ?
- " Certainement pas. Il y a assez de bêtes à la maison, et ces poussins seront tous morts demain. Tu le sais bien, tu as vu comment  doivent grandir les poussins chez Madame Alazard, ceux-là ne peuvent pas vivre.
- " Maman, s'il-te-plaît, pourquoi ne pas essayer d'en sauver un ?
- " Non, pas question. Décidément, tu es vraiment canulante. Je ne t'emmènerai plus faire les commissions avec moi. Tu demandes toujours l'impossible
- " Maman, 1 franc, c'est vraiment pas cher, et si jamais on réussissait à en sauver au moins un ?
- " Allez, viens, je fais les commissions d'abord "

Le " d'abord " ne m'avait pas échappé. Mais il y avait tellement de personnes qui en voulaient ! En resterait-il quand maman aurait fini ses commissions ? J'essayais de la presser, mais elle ne voulait plus m'écouter.

Quand enfin maman eut terminé ses achats, je la harcelai de nouveau :

- " Maman, il te reste bien 1 franc. 1 franc, ce n'est rien, maman....S'il-te-plaît, maman "

( petit rappel : à cette époque, les "anciens francs" vivaient leurs dernières semaines)


Nous remontâmes donc la rue Mouffetard, et je me hâtai vers les poussins....

Cela me faisait tellement mal au coeur de les voir entassés comme cela, essayant de se grimper les uns sur les autres pour pouvoir respirer, et dans le froid.

Je voulais absolument essayer d'en sauver un, même si je savais très bien qu'un poussin de 2 jours n'a aucune chance de survivre dans ces conditions....

- " Tu ne viendras pas pleurer quand il va mourir. Car tu sais qu'il va mourir, n'est-ce pas ? "

Bien sûr, je savais que mon poussin allait mourir. Mais je préférais qu'il meure dans le creux de mes mains, au chaud, plutôt qu'étouffé par tous les autres. Quant à "pleurer" ??? Il y avait belle lurette que je ne pleurais plus !!!

Une fois de plus, maman céda à sa "canulante de fille", et nous revînmes dans le logement avec un minuscule poussin....
Papa fit une drôle de tête, et parla des saletés que ce nouvel animal allait faire...et il s'empressa de recouvrir le grand lit de journaux ...J'y déposai avec précaution mon petit Poupou, qui se mit à courir vers les mains que nous lui tendions....Oh ! le bruit de ses petites pattes qui piétinaient le journal pour venir vers nous ! Je l'entends encore. Mes parents s'étaient pris au jeu, et Poupou devait se fatiguer à force de courir.
Maman lui prépara une mixture que je lui donnai dans ma main...Heureuse surprise : il était capable de picorer tout seul !

Pour la nuit, papa l'installa dans une ancienne cage à oiseaux qu'il plaça en haut de l'armoire.
Ne voyant plus personne, Poupou se remit à pépier de toutes ses forces....
Mais mes parents restèrent inflexibles : il passerait la nuit la-haut, et de toute façon, demain, il serait mort.

Je m'endormis le coeur gros, et même ma Mickeyte collée contre moi - elle avait regardé Poupou avec intérêt, mais sans aucune méchanceté - n'arrivait pas à m'ôter les idées noires....

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Evidemment, lorsque je m'éveillai le lendemain matin, Poupou était silencieux....

- " Je t'avais prévenue. Il est mort, bien sûr. Y a plus qu'à descendre la cage et s'en débarrasser".

Mais au moment où papa grimpa sur la chaise pour récupérer la cage, les pépiements retentirent, plus affirmés que la veille ! Mon coeur qui s'était arrêté de battre pendant quelques instants s'emballa de bonheur.
Poupou était vivant !!!!

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Les jours qui suivirent, maman continua à lui préparer une mixture, papa installa un "parc" à côté du cageot de Kiki, et Poupou commença à s'habituer à sa nouvelle vie de poussin parisien . Il aimait rejoindre Kiki, mais préférait la chaleur de Mickeyte pour ses moments de repos.


(quel dommage de pas avoir de photos de ces moments de tendresse....)
C'est ainsi que Poupou grandit, en toute liberté, jouant avec Kiki ou se blottissant contre Mickeyte.
Son duvet de poussin avait disparu, et Poupou avait pris de jolies couleurs..

Un matin, je fus réveillée par un "cot cot codette " retentissant !!!!
Quelle joie : Poupou était une poule !!!
Plusieurs jours de suite, les "cot cot codette" remplirent la maison. Poupou se faisait les cordes vocales en répétant à qui mieux mieux sa chanson de poulette.

Mais quelques jours plus tard, le "cot, cot, codette" se transforma en un "cocorico" puissant !!!!
Poupou n'avait rien d'une poulette : Poupou était un jeune coq !!!
D'ailleurs, ses plumes et sa crête se transformèrent petit à petit, et le doute n'était plus permis !!


L'été suivant, Poupou nous suivit à Chilly (car il est évident que si les poissons et les perruches - qui n'allaient pas tarder à mourir - restaient à Paris, Kiki et Mickeyte faisaient partie de toutes nos escapades).

Un jour, Mickeyte se sauva..... Elle n'avait fait que quelques mètres vers la rue, mais Poupou, qui vivait en liberté, l'aperçut, vola vers elle tout en la contournant, et lui fit face, la ramenant vite fait vers la maison en lui assénant quelques petits coups de bec !

Hélas, cette même année, Kiki mourut....Ce matin-là, aucun roucoulement de plaisir, aucun couinement de bienvenue n'accueillirent papa à son arrivée dans la cuisine.

Ainsi va la vie...et la mort....
Dure loi impitoyable de la nature qui accepte que les compagnons tant aimés des petites filles meurent toujours trop vite.....








jeudi 17 janvier 2013

Chanter.....avec Luis Mariano


                         
                               
Il y avait d'un côté la fillette qui grandissait, s'émerveillant au contact des fleurs et des plantes,
d'un autre côté, la fillette désormais responsable de
ses poissons, de ses oiseaux, de Kiki et de Mickeyte ;
la fillette mal dans sa peau (sauf à l'école où elle retrouvait ses petites copines et où elle apprenait tant de choses intéressantes), et la petite sauvageonne de Chilly qui  se sentait si bien à la campagne et qui attendait ces moments avec tant d'impatience...



Mais j'avais également un autre centre d'intérêt qui faisait battre mon coeur à toute allure : la musique.

J'aimais chanter, même s'il m'était difficile de chanter en même temps que maman ( maman avait une voix de contralto, voire une voix de basse.....Et elle aurait aimé que je "ne chante pas si haut"....)

Le tourne-disque étant rarement utilisé, mon univers musical se limitait donc aux Chansons de Bob et Bobette, à celles de Bourvil (il avait enregistré des chansons qu'il interprétait avec des enfants - je me souviens encore de la "Belle Abeille", entre autres.-.), et aussi à celui de mes parents : j'entendais sans aucun plaisir la Cavalerie Légère de Franz von Suppe, mais j'aimais chanter " La Chanson des Blés d' Or" avec André Dassary.

Heureusement, j'avais un grand frère pas vraiment présent mais qui me fascinait lorsque nous nous retrouvions car il jouait de plein d'instruments : de l'harmonica, du banjo, et de la clarinette, notamment. Il était passionné de jazz, et  aimait Sydney Bechet et Maxim Saury.  "Petite Fleur" et "Les Oignons" étaient les morceaux que je préférais...




C'était un début, mais j'avais envie de chanter autre chose, et je fus comblée lorsque notre maîtresse nous proposa d'aller assister au Châtelet à l'operette " Marco Polo" avec Luis Mariano et  Janine Ervil.          Cette expérience  allait me plonger dans un univers sonore et coloré encore plus fantastique que tout ce que j'aurais pu imaginer.                        .
Si je n'ai pas compris grand-chose à l'histoire en elle-même, jamais je n'oublierai les décors fabuleux qui s'offraient à mes yeux et les voix incroyables de Luis Mariano et de la chanteuse qui lui répondait avec sa si jolie voix.                            

Je connaissais les chansons du disque par coeur, et je les chantais dans la cour de récréation pour mes petites camarades..... Je les connais par coeur aujourd'hui encore....

   pour les nostalgiques ou ceux qui ont envie de découvrir, rendez-vous ici : 
http://www.musicme.com/#/Luis-Mariano/albums/Le-Secret-De-Marco-Polo-(Le-Meilleur-De-L'operette)-3661585822714.html



(voici la pochette du disque que j'ai écouté tant et tant de fois)

Chacun entre dans l'univers musical grâce à un coup de coeur inattendu..... Tel fut mon premier coup de coeur...bien loin de la musique que j'aime désormais..... Mais on n'oublie jamais un premier amour....







mercredi 16 janvier 2013

Mickeyte





En avais-je rêvé, d'avoir un chat bien à moi !!!
Les minous m'avaient toujours attirée, mais depuis que j'avais l'opportunité d'en prendre dans mes bras, de les caresser, d'entendre leur petit moteur se mettre en marche, je ne pensais plus qu'à cela :
-"S'il-te-plaît, maman, quand est-ce que j'aurai un chat ?"
Notre logement exigu de Paris commençait pourtant à vivre au rythme des bruits de mes petits compagnons.
Certes, les poissons rouges restaient silencieux, mais les perruches ne nous laissaient guère de moments de silence. Quant à Kiki, il était lui aussi très bavard : quand papa ou maman se levait le matin, Kiki se mettait à "roucouler" de bonheur. Je l'entendais depuis mon lit ; il guettait leur arrivée en courant tout autour du cageot où il passait la nuit, et la vue de mes parents le faisait couiner de plaisir.

Mais avoir un chat..... Cela m'apparaissait comme le comble du bonheur !

Mes parents devaient être tellement excédés par mon insistance - et peut-être qu'au fond d'eux-mêmes, ils n'étaient pas contre (après tout, ils avaient déjà eu un chat.... ) - qu'ils me promirent ce chat tant désiré pour quand "j'aurais l'âge de raison".
Car, tout comme je m'occupais de Kiki, je devrais veiller sur mon chat, le peigner, le nourrir, tenir sa "caisse" propre.

J'attendais donc mon septième anniversaire avec impatience.

Vint enfin le jour où nous partîmes en direction des boutiques qui vendaient des animaux le long de la Seine.
(j'espère de tout coeur que lorsque j'avais 7 ans, les animaux que l'on achetait dans ces magasins étaient autrement traités que maintenant.... Comment aurais-je pu savoir ?)

J"avais une idée bien précise du chat que je souhaitais : il devait être tout noir, ou alors, être un chat siamois, et un bébé, cela va de soi.
Si je ne trouvais ni chat noir, ni chat siamois, tant pis, ce serait pour une autre fois. Mais je ne reviendrais pas là-dessus! 
Nous sommes donc entrés dans tous les magasins - une bonne quinzaine, certainement.....-
Il y avait de fort beaux chats qui dormaient, le plus souvent, blottis les uns contre les autres, derrière les vitres. Certains étaient adultes, la plupart étaient des bébés.... Papa me désignait tel adorable chaton, ne comprenant pas pourquoi je ne craquais pas pour lui..... Puis un autre.....Et encore un autre.....

Non, rien à faire : aucun de ceux sur lequel il tentait d'attirer mon regard ne me faisait battre le coeur plus vite. Et puis, il n'y avait ni chat noir, ni chat siamois.....

Nous étions donc déjà sur le chemin du retour, et le soir commençait à tomber, lorsque j'aperçus, un peu plus loin, une dernière boutique. 
Mes parents essayèrent en vain de me dissuader d'y entrer, mais j'insistai tellement que nous retraversâmes la rue.

Et là, je vis, dans une cage grillagée - pas derrière une vitre - un chaton déjà un peu grand (il devait avoir 3 ou 4 mois) qui ne tenait pas en place, qui s'accrochait au grillage, qui miaulait son désespoir. 

- " Voilà le chat que je veux. C'est celui-là".
- " Mais..... tu voulais un chat noir, tu voulais un chat siamois......celui-là est noir et blanc. Tu vas le regretter...Et il est déjà grand....Or, tu voulais absolument un bébé "
- " C'est celui-là que je veux. Il est trop malheureux. Il faut le sortir de sa prison".
- " Regarde : au fond, il y a plein de bébés chats noirs et aussi des siamois, comme tu voulais".


C'était vrai : c'est dans cette dernière boutique qu'il y avait enfin des chatons noirs, et des siamois....

- "Non, je veux que le noir et blanc sorte de là"
- "Ce que tu peux être canulante ! Tu nous as fait rentrer dans tous les magasins, tu ne regardais même pas les chats parce qu'ils n'étaient ni noirs, ni siamois, et là, il y a les chats que tu voulais, et tu en veux un autre..!"
- "Je veux celui-là".

Je restais inflexible.
Mes parents hésitaient, essayaient de me montrer que je faisais fausse route, que je le regretterais toute ma vie, et ils me répétaient qu'une fois qu'il serait acheté, on ne pourrait plus revenir sur cette décision...Peine perdue : ma décision à moi était prise. Quand le vendeur nous avertit qu'il s'agissait d'une chatte, je sentis que  mes parents allaient refuser définitivement... Car la seule condition qu'ils m'avaient imposée était que je prenne un mâle.  Et pourtant...... bien que le choix d'une minette les contrariât au plus haut point, ils dirent ce mot magique : OUI ....

Le vendeur entrouvrit à peine la porte de la cage....et ...voilà la chatte enfuie ! Je faillis hurler de terreur à l'idée qu'elle allait sortir dans la rue et se faire écraser. Heureusement, il réussit à la rattraper et à l'enfermer dans un panier minuscule.
L'espace d'un instant, mon coeur s'était arrêté de battre.....

Dès son arrivée à la maison,  Mickeyte - étant donnée sa couleur, ce nom s'imposait -, se sentit à son aise. Bien que timide et encore affolée par les derniers évènements qu'elle venait de vivre, elle ne se fit pas prier pour venir dans mes bras, - et le petit moteur se mit en route immédiatement -, aller déguster la "viande hachée" achetée en prévision de sa venue, et faire son premier petit pipi dans la caisse pleine de copeaux de bois prévue à cet effet. 
Les présentations avec Kiki étant faites, l'estomac plein et enfin rassurée, elle s'endormit au creux de mes bras....






Une merveilleuse complicité allait nous unir pendant presque 17 ans.....





dimanche 13 janvier 2013

Chilly.....Une autre vie




En route vers la liberté......


Ce fut le plus beau de tous les cadeaux que l'on m' a offerts : avoir la possibilité d'aller vivre de temps en temps à la campagne, et surtout, de partager la vie de " l'infermière" comme j'ai appelé Madame Alazard  au tout début de nos escapades.
Je suppose que pour pouvoir nous offrir ce "luxe", il avait été conclu de manière tacite que mes parents devraient aider un minimum au travail quotidien...

Je voyais souvent ma mère dans la buanderie en train de laver des draps, ou bien elle préparait les repas ou s'occupait des tâches ménagères.

Pour mon père, il s'agissait surtout de remettre des clôtures en état ou encore de bêcher le jardin potager : c'est le souvenir le moins agréable que j'ai conservé....Papa bêchait, je devais ramasser les vers énormes qui sortaient de la terre fraîchement retournée pour les donner ensuite aux poules.

Quand je dis "énormes", je n'exagère pas : je n'en ai jamais revus d'aussi gros et d'aussi longs : ils dépassaient facilement les 40 cm et étaient plus gros que mes doigts. Je ne trouvais pas leur contact particulièrement plaisant. D'ailleurs, j'ai lâché les premiers avant de surmonter mon dégoût. Ensuite, je faisais cela machinalement, et les poules semblaient ravies de ce festin quotidien.


J'aimais bien les poules auxquelles je devais donner du grain matin et soir. Ce qui m'étonnait surtout, c'est que leur cou était tout déplumé : le coq avait coutume de leur sauter sur le dos et de s'accrocher à leur cou....!
- " Il est méchant, le coq ! Pourquoi il fait ça, maman ? "


Le soir, quand toutes ces bêtes à plumes avaient regagné leur perchoir, je devais fermer soigneusement la porte du poulailler. Auparavant, j'avais nourri les lapins que j'affectionnais tout particulièrement, avec leurs grandes oreilles et leur bout de nez toujours frémissant.
Parfois, Madame Alazard isolait une lapine, et plusieurs jours plus tard, je découvrais au réveil qu'il y avait un nid au fond du clapier. J'aurais bien aimé voir les bébés, mais elle m'avait expliqué que si je touchais le nid, la maman lapin tuerait ses bébés.....

 ( des années plus tard, beaucoup plus tard !!!, alors que j'avais achetés des petits lapins nains, je pus admirer la façon dont la maman préparait son nid en ramassant d'abord le plus de paille possible qu'elle disposait en une couche confortable, puis en s'arrachant les poils de tout son corps pour tapisser son nid. Et je pus toucher les bébés - qui ressemblent à des limaces à leur naissance - sans que la maman tue les petits. Mais j'avais tellement l'habitude de manipuler mes petits compagnons que mes petites lapines me faisaient une confiance absolue...)

Ma mère et moi devions également aller faucher de l'herbe - en prenant bien garde qu'il n'y ait pas de boutons d'or - poison mortel pour les lapins - . Une partie de l'herbe était mise à sécher pour le lendemain, et seules quelques tiges encore fraîches leur étaient données.

Nous devions aussi ramasser les fruits trop mûrs tombés à terre et  porter les cageots à côté des tonneaux dans le chais - lieu que j'évitais pour deux raisons : l'odeur des fruits qui fermentaient  me rendait malade, et la multitude de guêpes que ce lieu attirait me faisait peur..

Par contre, j'aimais bien assister aux travaux des champs. Et avant la moisson, je ne manquais pas de cueillir les 7 brins de blé censés apporter la prospérité pour l'année à venir. Cette blondeur qui ondulait sous le vent était magnifique, d'autant plus qu'elle était parsemée de coquelicots et de bleuets....




Comme les paysans, je guettais le ciel, pour essayer de deviner si le temps allait rester clément, ou bien si un orage risquait de compromettre l'avancement des travaux.
J'avais déjà les yeux dans le ciel auparavant - je ne me lassais pas d'admirer la variété des couleurs " de l'aube au couchant", d'observer les nuages, de scruter l'azur pour voir l'évolution des oiseaux tout au long de la journée..... de plus en plus, je vivais "la terre en l'air et les pieds sur terre" - dans la terre, devrais-je dire....

J'avais un faible pour le ciel nocturne et ses mystères....et il fallait que mes parents insistent beaucoup pour me faire rentrer, la nuit tombée.

A Chilly, j'ai surtout appris à vivre entourée de chats, et également à être suivie dans toutes mes activités par la chienne Boulie qui débordait d'énergie. Si j'avais reculé devant elle le premier jour où nous fîmes connaissance ( j'avais encore peur des chiens, et celui n'était même pas attaché !!!!), cette crainte s'était transformée en "amour" réciproque. Elle ne me quittait que lorsque Madame Alazard l'appelait, et je vivais son absence à mes côtés comme un manque.




La petite Parisienne se transformait jour après jour, saison après saison, et devenait de plus en plus une amoureuse de la vie simple de la campagne, même si la vie parisienne avait encore de nombreux attraits.....
animaliers !!!


samedi 12 janvier 2013

Retour à l'école en janvier 1957


(forsythia en fleurs)


A mes yeux (et je suppose aux yeux de mes camarades de classe également), ma maîtresse était formidable.
Au mois de janvier, après les vacances de Noël, elle arriva avec des branches et un bocal (genre bocal pour les conserves) qu'elle remplit d'eau. J'étais vraiment intriguée : à quoi bon mettre des branches d'arbuste dans  un vase ? Des fleurs, oui, j'aurais compris....Quoique.....des fleurs au mois de janvier, surtout à Paris, cela m'aurait semblé tout aussi bizarre....
Je me débrouillais chaque jour pour passer à côté de ces curieux branchages morts qui trempaient dans l'eau renouvelée chaque matin.... Je n'osais pas demander à ma maîtresse ce qu'elle voulait en faire. Au début, j'avais imaginé que nous allions devoir les dessiner - et cette idée me plaisait bien -, mais les jours passaient, et les branches continuaient à faire trempette......!

Et, un matin, alors que, comme d'habitude, j'observais ce vase ( de façon de plus en plus circonspecte), j'aperçus une sorte de renflement au niveau d'un noeud.... Puis un autre......

Le lendemain, les "bosses" avaient encore grossi, et de nouvelles s'étaient formées....

Je ne pus retenir la question qui me brûlait les lèvres depuis bientôt 3 semaines....." Maîtresse, qu'est-ce que c'est ? Ce sont des bourgeons ? C'est quel arbre ? "

Et notre maîtresse nous expliqua qu'il s'agissait de l'un des premiers arbustes qui fleurissent, qu'elle avait rapporté ces branchages pour nous montrer que la vie continuait à circuler même pendant l'hiver. La nature était vraiment bien faite !!! J'étais admirative, après avoir été si longtemps perplexe.
Effectivement, dès le lendemain, les bourgeons firent place à de toutes petites fleurs jaunes, qui s'épanouirent en un bouquet magnifique. Mais que ce nom était difficile à retenir !!!! Et encore plus à écrire !!!!!

                                      *****************************

Puis, quelques semaines plus tard, j'appris à mettre des lentilles et des haricots dans du coton humide au fond d'un récipient. Là encore, j'eus de jolies surprises lorsque mes lentilles s'ouvrirent, et qu'une jolie tige bien verte fit son apparition et grandit....

                                                                   
                                                         
Dès lors, je n'eus de cesse de "faire pousser" tout ce que l'on pouvait faire pousser sur un rebord de fenêtre parisien.....

Et c'est ainsi que je semai mes tout premiers radis, et que les plantes aromatiques firent leur apparition au troisième étage.......
(mes plantations auraient bien mérité de jolis pots colorés comme ceux-ci...... Mais je  dus me contenter des pots en terre que mes parents mirent à ma disposition..... Ce qui était déjà une grande faveur...)




Ma vie de petite citadine avait déjà bien évolué ces deux dernières années. Elle allait devenir plus passionnante encore lorsque mes parents choisirent de passer le plus de temps possible chez l' "infermière" de Chilly-Mazarin.






                                  ( Le Château de Chilly tel que je l'ai connu dans les années 55 / 62)




                                                                                                                                                                                                                 



jeudi 10 janvier 2013

Un petit coin de campagne à Paris




(le célèbre Cèdre du Liban du Jardin des Plantes)



Même si l'école me passionnait, je n'avais rien oublié de tout ce que j'avais vu à la campagne, et mes deux poissons rouges étaient loin de suffire à mon besoin d'être entourée de bestioles et de verdure.
J'étais devenue une grande petite fille avide de tout voir, de tout savoir, de tout connaître, et, à défaut de vivre à la campagne,  le Jardin des Plantes  continuait à être mon lieu de découvertes de prédilection, même si, à mon retour, je l'avais trouvé rapetissé par je sais quelle magie.

Je ne redoutais plus de me perdre dans le labyrinthe - vraiment pas si grand que cela, finalement -, et comme désormais, ma mère ne me tenait plus fermement par la main, j'étais libre de toucher (en cachette) toutes les sortes de plantes qui se trouvaient à ma portée. Elles étaient tellement différentes de celles que j'avais vues aux Breuillerons ! Certaines étaient luisantes mais un peu rugueuses, d'autres toutes douces et veloutées. J'essayais de me rappeler tous les noms inscrits sur les petites pancartes, mais c'était quasiment mission impossible, la plupart des mots étant notés dans une langue que je ne comprenais pas....
J'aimais surtout poser ma main sur le tronc de tous ces immenses arbres dont je ne voyais pas la cime. Quand un arbre était moins imposant que ceux qui l'entouraient, j'essayais de l'entourer de mes bras, et j'attendais avec impatience le jour où mes bras seraient suffisamment grands pour pouvoir le faire.
Bien sûr, je savais qu'il était interdit de toucher, mais je ne redoutais plus le "méchant garde qui surveillait les petits enfants pas sages et les emmenait"...Instinctivement, je respectais les plantes, et même si j'avais toujours besoin de les toucher, de les renifler, jamais je n'aurais cueilli une plante "protégée" ..

Et d'ailleurs,  j' avais compris que les mises en garde de ma mère étaient tout à fait injustifiées :
Je tendais ma main vers les moineaux et les pigeons pour leur proposer les miettes de mon goûter ; ils se hasardaient à se poser sur mon bras, ma tête ou ma main, et je n'ai jamais été "mordue" !! Tout au plus, parfois, le petit coup de bec d'un pigeon  me faisait légèrement frémir...J'appelais cela : le baiser du pigeon.
J'osais donner le pain aux canards, et bien que je me sois fait pincer à plusieurs reprises, il m'en aurait fallu d'autres pour me stopper dans mes nouvelles activités animales...Comme diraient les enfants aujourd'hui : "même pas mal" !!!

Pour répondre à mes demandes incessantes d'avoir un chat, mes parents avaient transigé en m'apportant à deux reprises une tortue. Elles étaient bien mignonnes, ces grosses bestioles qui marchaient lentement et rentraient la tête sous leur carapace à tout instant. Mais hélas, elles étaient mortes l'une après l'autre sans raison apparente (ce n'est que bien plus tard que je compris l'erreur monumentale que les gens de ma génération commettaient en achetant ce genre d'animal..... Cela me perturbe aujourd'hui encore d'avoir contribué bien involontairement à la raréfaction des tortues de terre)

Puis, notre promenade du dimanche nous emmena de plus en plus fréquemment au "Marché aux fleurs et aux oiseaux", ainsi que sur les quais de la Seine où l'on trouvait toutes sortes d'animaux. Ces premières sorties dans ces lieux paradisiaques me comblaient de bonheur : les fleurs avaient des multitudes de couleurs, d'odeurs, de tailles.... Quant aux oiseaux, je les aimais tous, et, bien sûr, je ne tardai pas à en réclamer à mes parents. Pourquoi pas des perruches ? Leurs couleurs -une fois de plus- m'attirait, et ce n'étaient pas des oiseaux farouches : comme le montraient les vendeurs, elles venaient volontiers se poser sur la main....J'appris très vite à distinguer les mâles des femelles, et un couple en appelant un autre, ce furent bientôt 3 couples de perruches qui occupèrent la minuscule cage dans laquelle nous les avions enfermés. Sans savoir pourquoi, ces jolis oiseaux me mettaient mal à l'aise : certes, j'aimais les voir se bécoter ;  certes, ils venaient se poser sur ma main ; certes, ils étaient bruyants - et j'appréciais la vie qui explosait dans ces cris - ; mais..... étaient-ils heureux ? Je commençais à m'interroger.....

Des perruches, des poissons rouges, c'était bien oui, mais l'une de mes petites copines avait un cochon d'Inde. Voilà un animal intéressant ! Il avait le droit de courir dans son appartement, et - atout indéniable -, n'était pas aussi bruyant que les oiseaux !
Et c'est ainsi qu'un dimanche, je revins avec Kiki, mon cochon d'Inde tant désiré.... Mon Kiki....que de bons souvenirs : papa lui avait fabriqué un refuge dans un cageot, et j'avais pour tâche de le nourrir et de nettoyer le cageot. Si mes parents avaient secrètement espéré que cette dernière tâche me rebuterait, ils s'étaient bien trompés : un cochon d'Inde est très propre, et nettoyer son "coin-toilette" est tout à fait dans les capacités d'une petite fille de 6 ans.
Et Kiki passait son temps dans mes bras ou sur mes genoux. Pendant les repas, il ne cessait de passer des genoux de l'un à l'autre, et, ce qui était très drôle, c'est qu'il avait pris l'habitude de crotter sur les genoux de papa. Drôle d'idée, qui était devenu un sujet de plaisanterie, mais qui ne fâcha jamais personne : papa avait soin de recouvrir ses genoux d'un tablier "exprès" !!!

Les fleurs me plaisaient beaucoup - sauf les chrysanthèmes que j'ai détestés d'emblée, alors que je ne savais pas encore en quelles occasions on en voyait le plus - . Mais au Marché aux Fleurs, il y en avait trop. J'aurais aimé  regarder chacune d'entre elles, sentir leur odeur....Mais il y en avait tellement, et mes parents n'avaient guère envie de s'arrêter devant chaque marchand.... Dommage : je les confondais toutes, et j'étais frustrée de ne pas pouvoir discerner le parfum de chacune d'elles.

Par contre, je  n'aimais toujours pas l'odeur des roses. Pour le 1er mai, papa avait offert à maman un brin de muguet, et son parfum m'avait enivrée. J'allais plusieurs fois par jour humer ces jolies clochettes blanches, mais je fus déçue lorsqu'elles jaunirent et finirent à la poubelle. J'aimais aussi l'odeur des petites violettes. Hélas, cela fut de courte durée : une tante qui venait de temps en temps, toujours impeccablement vêtue, le visage plein de poudre de riz, et qui aurait aimé que je vienne sur ses genoux (ah non, alors !! pas question !!! et surtout pas de "baiser" !!!),est arrivée un jour parfumée à la violette. Terminé, mon goût pour l'odeur de cette fleur que l'on transformait en parfum douceâtre et écoeurant !



Et, en plus, on m'avait quelques jours auparavant proposé un bonbon à la violette que j'avais dû recracher tellement je le trouvais mauvais !!!!
Mais la petite fleur qui savait si bien se cacher - mais pas à mes yeux de petite fille curieuse - me plairait tout de même toujours.....



(deux photographies du Jardin des Plantes..... Finalement, en voyant des photos, je retrouve mes souvenirs intacts.....)







mardi 8 janvier 2013

Les Breuillerons





Cette même année, la petite Parisienne qui ne connaissait la nature qu'au Jardin des Plantes (j'arrivais enfin à prononcer ce mot correctement !) eut l'immense bonheur de partir en vacances ..

J'en garde un souvenir mitigé : certes, les Breuillerons allaient me permettre de m'évader enfin d'un univers qui ne me convenait guère,et j'appris à savourer les choses les plus simples que l'on ne trouve qu'à la campagne, mais je fis également des découvertes qui me plongèrent dans la tristesse et la perplexité....                                                                                     
                                                                                                     


Ce qui m'a frappée en premier lieu, ce fut tout ce vert : partout des arbres ; partout de l'herbe ; partout des bosquets ; partout des fleurs.... Et pas de rues, pas de grands immeubles, des sentiers, des maisons isolées, et des poules, des chiens, des vaches, des chats....


La maison que la famille réunie avait louée avait ceci d'extraordinaire pour moi : je pouvais sortir dans la cour sans avoir besoin de demander la permission, et il y avait une sorte de grange où j'aimais aller observer les hirondelles qui y avaient élu domicile. Je guettais les nids dans le vain espoir de voir un bébé s'envoler...
Elles étaient des dizaines et des dizaines à voler
toute la journée, de la grange vers l'extérieur, puis
de l'extérieur vers les nids..




           







Dans la maison, je revois les minuscules fleurs de poussière qui dansaient dans le rayon de soleil qui filtrait par les fenêtres. J'essayais de les capturer, mais en vain. Alors, j'observais leur ballet incessant.....






Nous allions chercher le lait dans une ferme proche. J'entendais les vaches qui étaient rentrées pour la traite, j'aurais tellement voulu les voir de près, mais cela ne me fut jamais permis. Ce serait pour l'année suivante. Je me revois, très fière, portant le pot à lait à l'aller,  faisant tinter le couvercle sur le pot en le balançant au bout de mon bras (évidemment, au retour, ce plaisir m'était refusé....... bizarre.....)


Mais dans la cour de cette ferme, l'adulte qui m'accompagnait se saisissait de ma main, car les aboiements des chiens qui tiraient sur leurs chaînes m'effrayaient. Décidément, les chiens devaient être des animaux dangereux puisqu'on les attachait.....Heureusement, il y avait aussi des chats, des chats qui dormaient ici ou là, sur un muret, sur le rebord d'une fenêtre, d'autres qui partaient en vadrouille, des chats sur la paille, des chats qui se laissaient caresser......
Ils se mettaient alors à ronronner, et ce petit moteur qui se mettait en marche sous mes doigts me ravissait..





Je profitais de l'autorisation qui m'était accordée de quitter la maison pour marcher dans l'herbe. Ici, pas de pelouse interdite où l'herbe rase ne laissait s'épanouir que quelques pâquerettes. Non, de l'herbe, de la vraie,qui poussait entre les pavés de la cour, de l'herbe haute dès que je quittais la cour, et qui m'arrivait aux genoux, de l'herbe coupante parfois, de l'herbe douce où j'aimais m'allonger..... ("allons, relève-toi, que fais-tu là ? Tu vas encore te salir ! ")...., de l'herbe où poussaient des pissenlits qui fleurissaient jaune !! et que j'avais le droit de cueillir !  Et qui parfois n'avaient plus de fleurs, mais une jolie couronne blanche fragile qui s'envolait lorsque je soufflais dessus - comme sur le dictionnaire de mes parents -. Et je découvrais les boutons d'or et aussi les coquelicots ! Quelle fleur magnifique ! Encore plus belle que les pâquerettes, les violettes ou les fleurs de pissenlit !

Mais que je fus déçue lorsque je revins à la maison pour les offrir à maman et que je me rendis compte qu'ils étaient déjà tout flétris....
J'appris bien involontairement que les orties qui semblaient si douces et que j'avais voulu cueillir étaient en réalité de l'herbe qui brûlait les doigts !!!

Et je fis la connaissance de nouveaux animaux qui allaient devenir l'une de mes grandes passions : les escargots !
Certains étaient minuscules, quasiment plats, et avaient la coquille presque blanche ou à peine rosée. D'autres, un peu plus grands, avaient une coquille bien ronde et jaune qui brillait.  Mes préférés étaient les gros, marron, ceux qui avaient une jolie coquille luisante. Après l'ondée, je me précipitais pour aller les dénicher. C'était tellement drôle de les voir glisser sur les feuilles encore vernies par la pluie, les cornes bien droites....et quand je touchais leurs cornes, les escargots les repliaient  rapidement.... J'aurais passé des heures à les observer...


Nous allions souvent au bord de l'étang. Nous n'étions pas seuls : des pêcheurs s'y installaient souvent, et des enfants aux genoux couronnés (oh ! comme j'aurais aimé avoir du rouge aux genoux et aux coudes, comme eux....) jouaient ou faisaient du vélo. J'aurais bien aimé me joindre à eux, mais "j'étais trop petite" ....Je commençais à me lasser d'entendre toujours cette phrase qui mettait fin à tous mes désirs !

Je me consolais en apprenant à pêcher. A vrai dire, cela ne me plaisait guère de capturer les jolis poissons rouges qui peuplaient l'étang. Mon père m'avait montré comment il attachait une ficelle à un bout de bois, puis au bout de cette ficelle il fixait une épingle à nourrice à laquelle il accrochait un asticot encore vivant : et cette fichue épingle perçait la bouche de ces pauvres animaux qui voulaient gober la proie gesticulante. Mais puisque les grandes personnes m'assuraient que les poissons n'avaient pas mal ( la preuve : on les sortait de l'eau, on les détachait, et on les remettait dans l'eau dans laquelle ils s'empressaient de s'enfuir), je voulais bien regarder.... Jusqu'au jour où mes parents décidèrent de ramener 2 poissons rouges à Paris. Nous avions donc emporté le pot à lait pour le remplir d'eau, afin que les poissons continuent à vivre, même loin de leur étang. Et la pêche commença. Papa avait déjà mis deux jolis petits poissons dans le pot à lait et je les contemplais, lorsque soudain, un cheval et un poulain au grand galop passèrent sur le chemin ;  et le poulain fou, en faisant un écart, fit tomber le pot à lait.... Mes parents avaient eu le temps de me tirer en arrière, mais quand je revins au bord de l'étang, je vis le pot à lait renversé et les deux poissons écrasés ..... Je retenais mes larmes à grand peine, mais je découvrais qu' il y avait donc d'autres animaux que les chiens qui étaient méchants !!! Les poulains aussi étaient de vilaines bêtes.....

Ce fut le pire souvenir que je rapportais de mon séjour aux Breuillerons. Et les deux autres poissons (qui remplacèrent ceux qui avaient été piétinés, qui firent le trajet du retour dans le fameux pot à lait, et qui vécurent longtemps auprès de moi à Paris) me rappelleraient longtemps la méchanceté de certains animaux....

Je venais de passer mes premières journées à la campagne, j'avais attrapé un virus dont on ne guérit pas, et même la perspective de faire enfin mes premiers pas à l'école ( en dernière année de maternelle), de faire connaissance avec d'autres enfants de mon âge, d'apprendre à lire et à compter, même la perspective de découvrir plein de nouvelles choses ne pouvait me faire oublier qu'à la place du ciel où couraient des nuages aux formes changeantes, je ne voyais que des toits et des cheminées, et que le chant des oiseaux, les aboiements des chiens, tous les bruits de la nature vivante étaient remplacés par le bruit des voitures - pourtant encore peu nombreuses dans notre quartier - et l'absence d'odeurs agréables...

- " Dis, maman, quand est-ce qu'on retournera voir les vaches ? "